02/07/2016
Yves Bonnefoy (1923 - 2016)
Une pierre
Longtemps dura l'enfance au mur sombre et je fus
La conscience d'hiver ; qui se pencha
Tristement, fortement, sur une image,
Amèrement, sur le reflet d'un autre jour.
N'ayant rien désiré
Plus que de contribuer à mêler deux lumières,
O mémoire, je fus
Dans son vaisseau de verre l'huile diurne
Criant son âme rouge au ciel des longues pluies.
Qu'aurai-je aimé ? L'écume de la mer
Au-dessus de Trieste, quand le gris
De la mer éblouissait
Les yeux du sphinx déchirable des rives.
Pierre écrite (1965) in : Poèmes (Poésie Gallimard, 1982)
On me parlait
On me disait non, ne prends pas, non, ne touche pas, cela brûle. Non, n'essaie pas de toucher, de retenir, cela pèse trop, cela blesse.
On me disait : lis, écris. Et j'essayais, je prenais un mot, mais il se débattait, il gloussait comme une poule effrayée, blessée, dans une cage pleine de paille noire tachée de vieilles traces de sang.
La vie errante (Mercure de France, 1993)
Yves Bonnefoy
(1923 - 2016). Parmi ses autres recueils : Du mouvement et de l'immobilité de Douve (1953) ; Hier régnant désert (1958) ; Anti-Platon (1962) ; Dans le leurre du seuil (1975) ; Rue Traversière (1977) ; Ce qui fut sans lumière (1987) ; Là où retombe la flèche (1988) ; Début et fin de la neige (1991) ; Plus loin, plus vite (1996) ; L'encore aveugle (1997) ; La pluie d'été (1999), Les planches courbes (2001).
Récit : L'écharpe rouge (2016).
Nombreux essais sur l'écriture poétique, la traduction, la peinture.
Traducteur de Shakespeare.
19:00 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, poésie contemporaine
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