Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

21/10/2006

Agnès Adda

Des tours

 

 

Le donjon massif de Philippe-Auguste, sceau du roi sur la Terre des Loups. A son pied, je m'imagine courbée, semant, sarclant et priant.

 

Les tapis d'ardoises, cercles ou losanges qui s'envolent depuis les terrasses de Chambord. Je les déploie et je choisis le plus brillant pour survoler la Forêt des Chasseurs - je connais l'art de suspendre leurs flèches cruelles ; je gagne l'étoile des songeurs : c'est le paradis des fées.

 

La tour de Belem, le sucre de sa blancheur insoluble dans l'eau.

Je suis le poisson-chat qui la contemple éternellement ; ou celle à qui elle apparut lumineuse et virginale, lui inspirant de saints croquis : je commençai fillette et, jusqu'à la vieillesse, je fus ainsi le peintre d'une seule tour.

 

Notre-Dame, humble pour avoir été louée trop souvent et pour voir sous elle chaque jour couler la Seine et voir passer les amours. Ses tours ici se dressent, se dresseront ; je me tiens en équilibre sur ce sol ; la colère du ciel, très loin au-dessus de moi.

 

Double-tour ! Je pénètre au coeur chaud de Paris.

 

 

Tresses d'éveils. - Éclats d'encre, 2001. - 86 p.

 

 

Agnès Adda

 

D'elle je ne sais rien, sinon que Tresses d'éveil est son premier recueil, et à ce jour le seul.

 

 

11:10 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie

18/10/2006

Michel Baglin

Vivants

(extrait)

 

 

Obscur entêtement

de bête à ne naître

que pour être

là,

cet être empêtré

dans la pâte de l'espèce,

fidèle et trahi,

à sa propre mort

par avance

acquis.

 

*

 

Par avance promis

à reconnaître le poids

de l'absence,

la légèreté des présences,

l'inconsistance

d 'un passage

 

*

 

Inconsistance de ce qui lie,

oriente, dévie

le cours des jours,

choisit

l'improbable cheminement

des circonstances

pour dégager l'altérité

du pantelant,

désemparé

vivant.

 

L'obscur vertige des vivants. - Le Dé bleu, 1994. - 85 p.

 

 

 

Michel Baglin

 

Né en 1950. Parmi ses autres recueils :  Les mains nues (l'Age d'Homme, 1988, Prix Max-Pol Fouchet) ; L'alcool des vents (Le Cherche-Midi, 2004) ; Les chants du regard : sur des photographies de Jean Dieuzaide (Privat, 2006). Également romancier, nouvelliste, essayiste (Poésie et pesanteur, Atelier du Gué, 1984 et 1992 ; François de Cornière, Atelier du Gué, 1984 ; La perte du réel : des écrans entre le monde et nous, N & B, 1998). A créé et animé pendant une décennie la revue Texture.

 

 

21:35 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : poésie

14/10/2006

Françoise Coulmin

 

Sans compter l'automne l'été mais aussi le printemps

puis l'hiver précédent avaient été très secs

les planchers des fenils s'étaient dangereusement

allégés

non pas que les prairies soient condamnées

ni que les arbres aient tous séché

mais il y eut des vents de poussière

et des déboulements de morts buissons

des rumeurs de désert

 

 

A l'ouest de mémoire jamais même dans les livres

mares aux sourciers ne s'étaient tant vidées

ni rond d'humidité au fond des vases mais de la terre

livide

ni couche nuptiale ni bruit de berge

mais des coquilles abandonnées

les femmes enceintes et les jeunes mères s'affolaient

aux appels des radios il ne fallait plus boire

d'aucune eau

 

 

Pour durer. - Le Dé bleu, 1993. - 75 p.

 

 

 

Françoise Coulmin

 

Née en 1941. Parmi ses autres recueils : Entrer rebelle en ère de deuil (La Bartavelle, 1997) ; Une pâleur d'acharnement (L'Éclaireur, 1998) ; Mais de ce qui se perd (L'Arbre à paroles, 1998) ; Tous les hommes sont des poètes (Le Temps des cerises, 2002) ; Le monde saigne devant toi (Le Temps des cerises, 2005) ; La rue (Maison de la Poésie de Paris, 2005).

 

 

 

10:05 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : poésie