18/10/2006
Michel Baglin
Vivants
(extrait)
Obscur entêtement
de bête à ne naître
que pour être
là,
cet être empêtré
dans la pâte de l'espèce,
fidèle et trahi,
à sa propre mort
par avance
acquis.
*
Par avance promis
à reconnaître le poids
de l'absence,
la légèreté des présences,
l'inconsistance
d 'un passage
*
Inconsistance de ce qui lie,
oriente, dévie
le cours des jours,
choisit
l'improbable cheminement
des circonstances
pour dégager l'altérité
du pantelant,
désemparé
vivant.
L'obscur vertige des vivants. - Le Dé bleu, 1994. - 85 p.
Michel Baglin
Né en 1950. Parmi ses autres recueils : Les mains nues (l'Age d'Homme, 1988, Prix Max-Pol Fouchet) ; L'alcool des vents (Le Cherche-Midi, 2004) ; Les chants du regard : sur des photographies de Jean Dieuzaide (Privat, 2006). Également romancier, nouvelliste, essayiste (Poésie et pesanteur, Atelier du Gué, 1984 et 1992 ; François de Cornière, Atelier du Gué, 1984 ; La perte du réel : des écrans entre le monde et nous, N & B, 1998). A créé et animé pendant une décennie la revue Texture.
21:35 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : poésie
14/10/2006
Françoise Coulmin
Sans compter l'automne l'été mais aussi le printemps
puis l'hiver précédent avaient été très secs
les planchers des fenils s'étaient dangereusement
allégés
non pas que les prairies soient condamnées
ni que les arbres aient tous séché
mais il y eut des vents de poussière
et des déboulements de morts buissons
des rumeurs de désert
A l'ouest de mémoire jamais même dans les livres
mares aux sourciers ne s'étaient tant vidées
ni rond d'humidité au fond des vases mais de la terre
livide
ni couche nuptiale ni bruit de berge
mais des coquilles abandonnées
les femmes enceintes et les jeunes mères s'affolaient
aux appels des radios il ne fallait plus boire
d'aucune eau
Pour durer. - Le Dé bleu, 1993. - 75 p.
Françoise Coulmin
Née en 1941. Parmi ses autres recueils : Entrer rebelle en ère de deuil (La Bartavelle, 1997) ; Une pâleur d'acharnement (L'Éclaireur, 1998) ; Mais de ce qui se perd (L'Arbre à paroles, 1998) ; Tous les hommes sont des poètes (Le Temps des cerises, 2002) ; Le monde saigne devant toi (Le Temps des cerises, 2005) ; La rue (Maison de la Poésie de Paris, 2005).
10:05 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : poésie
08/10/2006
Pierre Garrigues
Mort touchant au vivant, vivant touchant au mort...
Comme les tortues à un obstacle, je me heurtais à la lumière, à cette mémoire enfouie dans l'immémorial néant de l'instant où je fus pure lumière... Éclair noir, le ventre de cette tortue, que je laissai renversée sur le dos, une après-midi, dans la pinède.
Ou celle qui traversait la route, dans le feu de l'été, je roulais vitres ouvertes, j'avais bu du résiné, je criais mille biftecks, ce ne fut qu'en entendant le craquement de la carapace que je revins à moi, et que je compris combien l'innocence de la lumière réside peut-être dans cette faute incompréhensible dont, selon Anaximandre, chaque être expie la dette envers les autres.
Les rivages de mémoire. - L'Arrière-Pays, 2006. - 46 p.
Pierre Garrigues
Parmi ses autres recueils : Paris-Ligne (Encres Vives, 1995) ; Fragments de lumière grecque (Encres Vives, 1995) ; Mont Athos (Encres Vives, 1996) ; Fragments des pauvres merveilles (Friches / Cahiers de Poésie verte, 1996, Prix Troubadours) ; Sonnets des morts et des vivants (Ecbolade, 1997) ; Le prix du jour (L'Arrière-Pays, 2000) ; De l'usage variable des cafés tunisois (Encres vives, 2006).
Mène parallèlement une réflexion sur l'écriture poétique et son soubassement philosophique : Poétiques du fragment (Klincksieck, 1995) ; Éloge de l'imparfait (L'Harmattan, 1997) ; Chutes et perfections : éloge du parfait (L'Harmattan, 1998) ; Le sonnet au risque du sonnet : colloque international de Besançon, décembre 2004 / textes réunis et présentés par Bertrand Degott et Pierre Garrigues (L'Harmattan, 2006).
12:25 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, poème, dette, innocence