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22/05/2015

Claude Ber

 

    Pas de secret derrière la porte
hors les gonds qui grincent un peu
juste un frisson de baguette sourcière
sur le frottement de la langue à
prononcer et à
lécher
- lécher des bouts de chair on fait cela d'aimer laper comme les bêtes -
et le sursaut brutal parfois      mordre ou n'importe qui
incruste
dans la viande vivre
dans sa durée la parole
lippe tendue vers la mer langue longue
ses tranches de bleu en gâteau d'éternité

 

          * * * * *

 

   le ciel diminué de brume hausse la ville
plus haut que lui et la mer s'humanise d'un bruitage d'organes greffé à son immensité
ses souffles, ses raclements de gorge, ses tapotements enjoués autorisent de vivre un instant à l'abri dans l'univers
   son entour invisible les yeux le logent en eux
à proportion de lui et à disproportion de nous
à notre juste place
de rebonds d'une balle
                                   dans son hasard

 

 Épître Langue Louve. - éd. de L'Amandier, 2015. - 112 p.

 

Claude Ber

Née en 1948. Parmi ses autres recueils : Lieu des épars (éd. Gallimard, 1979) ; Sinon la transparence (éd. de L'Amandier, 1996 et 2008) ; La mort n'est jamais comme (éd. Léo Scheer, 2003, éd. de L'Amandier, 2011) ; Plus rien ne pense aux restes (éd. L'Act Men, 2006) ; Orphée Market (éd. de L'Amandier, 2005) ; La prima donna suivi de L'auteurdutexte (éd. de L'Amandier, 2006) ; Vues de vaches (éd. de L'Amourier, 2009) ; L'inachevé de soi (éd. de L'Amandier, 2010) ; Aux dires de l'écrit (éd. Le Chèvre Feuille Étoilée, 2012) ; Monologue du preneur de son pour sept figures (éd. de L'Amandier, 2013).

 

 

23:35 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, poésie

24/03/2015

Michel Hardy

 

La murène est souveraine de son univers aquatique ; elle loge dans les anfractuosités sombres et glauques que tapisse la gorgone filigranées et frangent le corail rouge et l'anémone chatoyante. La murène aime son confort et n'extirpe la plupart du temps son corps sinueux de l'antre qui l'abrite qu'à moitié, comme s'il s'y trouvait quelque poêle auprès duquel elle continue de se chauffer les reins tout en observant le va-et-vient des autres créatures de l'onde. On l'imaginerait volontiers sous les traits d'une prostituée d'Amsterdam, n'exhibant que ce qui est nécessaire dans l'exiguïté de son cabinet vitré et ondulant en permanence pour attirer le miché. Malgré la certitude immédiate du danger représenté par les dents acérées qui garnissent son sourire paradoxal, les plongeurs aiment s'approcher de la murène pour tenter de caresser sa cuirasse niellée de bluettes.

 

     * * *

 

Ma sœur, mon erreur,

Au regard voilé d'un haïk couleur de cendre,

Aux pieds chaussés de mules de cuir de ténèbres sonnantes,

Quand me laisseras-tu oublier ?

 

Ma sœur, ma peur,

A la voix coiffée d'une guimpe couleur de muraille,

Aux mains gantées de mitaines de dentelle blanche absente,

Quand me laisseras-tu dormir ?

 

Ma sœur, ma douleur,

Aux lèvres ceintes d'un baiser couleur de sang,

Au ventre sanglé de désir de panthère des neiges fondantes,

Quand me laisseras-tu mourir ?

 

 

Je ne m'appelle pas (Michel Hardy) :

extraits des carnets de Chaïm Dreyl, 1929-1936.

- éd. Voix d'encre, 2007. - (env. 100 p.)

 

 

Michel Hardy

... ou Chaïm Dreyl ou bien Elie McRydha ou encore Rhàil McHedy... Comment s'appelle-t-il ? S'appelle-t-il ? Qui est-il ? Quand est-il ? Est-il ?

Je l'ignore. D'aucuns prétendent qu'il serait né en 1955.

Autres recueils signés Michel Hardy : Un risque de chaos (éd. Voix d'encre, 2002) ; Douzaines (éd. Librairie-Galerie Racine, 2005).

 

06:31 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, poésie

19/03/2015

Michèle Finck (4)

 

     Fauré : Requiem.

     Jean Fournet. Camille Maurane.

 

"Libera me Domine." Voix de Camille Maurane

Surgie de quelle douleur de ronces ? Vers l'offrande

De quelle paix ? L'orgue et les cordes tendus vers

Quelle délivrance de l'os ? Chœurs aux pieds nus

Élèvent une rosace de silence dans l'obscur.

 

 * * *

 

     Brahms : Sonate pour violoncelle et piano n° 2.

     Jacqueline Du Pré. Daniel Barenboim.

 

Rumeur sourde du violoncelle.

La neige des sons coule sur le visage enfant

Comme des larmes. Si les morts pouvaient

Parler entre eux, dit un ange,

Ce serait par le violoncelle.

  

 La troisième main. - éd. Arfuyen, 2015. - 142 p.

 

Michèle Finck

 
Née en 1960. Deux autres recueils : Balbuciendo (éd. Arfuyen, 2012) ; L'ouie éblouïe (éd. Voix d'encre, 2007).

Enseignante de littérature comparée à l'Université de Strasbourg, spécialiste d'Yves Bonnefoy et de Claude Vigée, dont elle a préfacé les oeuvres complètes parues aux éditions Galaade en 2008. Travaille notamment sur les liens entre la poésie et les autres arts : Poésie et danse à l'époque moderne : corps provisoire (éd. Armand Colin, 1992) ; Poésie moderne et musique : vorrei e non vorrei : essai de poétique du son (éd. Champion, 2004) ; Giacometti et les poètes : "si tu veux voir, écoute" (éd. Hermann, 2012).

Déjà invitée sur Poésiemaintenant, les 19 décembre 2006, 20 novembre 2008 et 29 septembre 2012.
Son site (lien ci-contre) : http://michele.finck.free.fr

23:28 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, poésie