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11/10/2007

Gilles Cheval

 

 

Nous avons découpé nos jours en petites heures superflues. Arpenté chacune d'elles minutieusement, de long en large et en travers, seconde après seconde. Tourné en rond jusqu'à la suivante, silence aux lèvres. Afin de subtiliser çà et là de rares indices, divers éléments à conserver. Juste de quoi rassembler, pour plus tard, quelques souvenirs plausibles. A découper délicatement, selon les pointillés.

 

 

 

(inédit)

 

 

 

Gilles Cheval

 

Né en 1973. Recueils publiés : "Brûlures" (Fer de chances, 1995) ; "Poète de banlieue" (Fer de chances, 1996) ; "La moindre des choses" (Fer de chances, 1998).

 

Un roman publié en 2003 aux éditions du Seuil : "Le crépuscule des clones".

Membre du comité de rédaction de la revue "Ici et là" (maison de la Poésie de Saint-Quentin-en-Yvelines). Parolier du groupe Apel Doorn.

 

Pour en savoir plus, rendez-vous sur son blog (nombreux textes inédits) : http://gillescheval.hautetfort.com/  (lien ci-contre, colonne de gauche),

ainsi que sur le site : http://verslaseine.hautetfort.com/

 

 

 

 

08/10/2007

Florence Pazzottu

 

Petite, lorsqu'à ma mère je demandai si elle m'aimait également quand contre moi elle s'emportait, elle répondit, troublée, qu'elle m'aimait également, que seulement peut-être elle oubliait qu'elle m'aimait ; sa réponse, fragile, fraya en moi un doute assez ferme pour y établir mes fondations, qui durent encore ; jamais je n'oubliai l'oubli possible de tout amour, ni la nécessité de se tenir au plus près de ce doute - à flanc de perte mais sans tomber - pour être au plus près de l'amour.

 

 

Petite. - L'Amourier, 2001. - 58 p.

 

 

Florence Pazzottu

 

Née en 1962. Parmi ses autres recueils : Les heures blanches (Manya, 1992) ; L'accouchée (Comp'act, 2002) ; L'inadéquat : le lancer crée le dé (Flammarion, 2005) ; La place du sujet : carnet du Panier (L'Amourier, 2007).

Un long texte, L'impossible (une archéologie), publié sur le site Inventaire/invention (lien ci-contre).

Animait la revue Petite (19 numéros, de 1995 à 2005).

 

 

05/10/2007

Gwen Garnier-Duguy

 

Sainteté je marche vers toi

 

A Pauline

 

 

Le jour se lève. Je marche. Mon corps porte les traces séchées du continent européen. Ses peuples se dressent dans mes jambes. Les innombrables mains retournées à la terre courent sur mes épaules, me soutiennent, espèrent que je conduise les élans qu'elles me donnent vers la certitude. Je marche. Je parle l'ancien français. Je parle le latin. Ma langue sait le grec. Me voici traversé par la Loire. Me voici traversé par le Rhône. Par le Tigre et l'Euphrate et le Nil. Je marche. Ma mémoire se baigne dans l'eau du Jourdain. Je suis sur le qui vive. Mon refus de ne pas marcher comme un prince sur le fil sécurisant du rasoir connaît le doute. Le doute rentre en moi. L'horreur économique me donne des palpitations. La corruption dévore la prunelle de mes yeux. Je sais que je peux tuer. Mon regard s'accroche à la voile triangulaire et blanche qui pénètre l'horizon. Je marche. A chaque seconde, je pousse l'Icare à s'élancer dans le ciel de mon corps. Mes bras me sont poussés pour que j'embrasse l'extraordinaire vie. Je marche. Je crois en Dieu. Comment le nommer aujourd'hui ? J'écrase le doute sous la marche de mon pas ferme. Je suis la route que le phare de mon front m'indique. Le sang ruisselle par les pores de ma peau. Le sang fait un cercle parfait à travers les prairies de mon corps. Mon sang est rouge comme le ciel. Le ciel est accroché à mes épaules et flotte en cape dans mon élan. Je marche. Je donne un regard de compassion aux tricheurs qui tentent de cimenter mes oreilles. Aux chants mensongers, j'accepte de serrer les mains. Je marche. je marche dans le flux du monde. Je remplis mes muscles de l'énergie que m'injectent les plombeurs de vie. Je marche. J'emprunte les escaliers qui ont été abolis. Je respire la glorieuse musique des pyramides. Derrière mes pas, la floraison des arbres morts jaillit. Je marche, le regard fixe, vers la plus vaste constellation de mon ciel azuré. Je marche dans la pureté de sa musique qui m'élève. Sans aucun doute, voici la plus haute cime de mon espérance. Sainteté je marche vers toi.

 

 

Publié dans le n° 18 de la revue Supérieur inconnu

(printemps-été 2000).

 

 

 

Gwen Garnier-Duguy

 

Né en 1972. Poèmes publiés dans les revues Supérieur Inconnu, Sarrazine, La Sœur de l'Ange, POESIEDirecte. Collabore à de nombreuses revues et journaux en tant que critique littéraire, notamment la Revue des deux Mondes. A participé en 2003 au colloque consacré au poète Patrice de La Tour du Pin au Collège de France. Fasciné par la peinture et le monde des images, collabore au catalogue Auguste Chabaud publié par la Réunion des Musées Nationaux.

Un roman, Nox, en collaboration avec Néro, sur l'œuvre du peintre Roberto Mangù (éditions le Grand Souffle, 2006).

 

Pour en savoir plus, le site : http://verslaseine.hautetfort.com/   (lien ci-contre, colonne de gauche).