31/07/2010
Jean-Vincent Verdonnet
Dans la houle de ses herbages
tu regardes fuir la prairie
qui chaque jour t'emmène un peu
*
Encore un jour pour écouter
battre inquiet le coeur du monde
dans cette gorge minuscule
à la cime du peuplier
questionnant en vain l'immense
*
La barque et le lac font la sieste
Le ciel en équilibre instable
se déleste de sa clarté
*
La fumée emprunte au silence
la douceur de ses mélodies
Jamais lassé le ciel écoute
*
Infatigable petit merle
des plus anciens jours de l'enfance
tu es revenu enchanter
l'âme pensive du vieil homme
qu'un souffle fera frissonner
ou ce nuage
qui interroge
été ton ciel énigmatique
ne se confiant qu'aux fontaines
*
Jardin d'été du presbytère
Le vieux curé s'est assoupi
laissant son bréviaire aux abeilles
Publié dans le n° 98 de la revue ARPA (avril 2010).
http://www.arpa-poesie.fr/
Jean-Vincent Verdonnet
Né en 1923. Plus de trente recueils publiés depuis 1951, principalement aux éditions Rougerie et Voix d'encre.
Parmi ces recueils : A chaque pas prenant congé (Rougerie, 1992) ; Où s'anime une trace (4 volumes, Rougerie, 1994-1999) ; Petit Poucet devenu grand (La Porte, 2002) ; Droit d'asile (Voix d'encre, 2003) ; Ombre aux doigts de sourcier (Voix d'encre, 2005) ; Tourne manège : récit (la Fontaine de Siloë, 2006) ; Jours déchaux (Rougerie, 2007).
Pour en savoir plus :
Jean-Vincent Verdonnet : actes du colloque d'Angers et Rochefort-sur-Loire de septembre 1998 / Centre de recherches en littérature et linguistique de l'Anjou ; textes réunis par François Durand et Georges Cesbron (Presses de l'Université d'Angers, 1999).
Jean-Vincent Verdonnet : profil d'homme, regard de poète / Marie-Claire Enevoldsen-Bussat (Éditions de La Fontaine de Siloe, 1999).
Un poète dans la classe : Jean-Vincent Verdonnet / Jean-Yves Debreuille (Presses universitaires de Lyon ; IUFM de l'Académie de Lyon, 1998).
Jean-Vincent Verdonnet / Joseph-Paul Schneider et Serge Brindeau (Éditions Subervie, 1981).
17:05 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : poème, poèmes, poésie, poésies
25/04/2010
Françoise Coulmin (2)
Je voudrais faire un poème
puissant
un poème de hurlement contre le cri
nu contre le dénuement
violent contre la violence
saccadé des dernières prostrations
sur une barque grillée de soleil
un poème d'esclave contre les nouveaux maîtres
et d'impuissance
contre toute nouvelle super puissance
de pauvreté contre la corruption
de gosse floué qui vieillit sans avenir
Un poème terrible
de peur de souffrance
et de soumission
qu'on écartèlerait
sur les murs et les barbelés de la honte
éventré comme un grabat ensanglanté
un poème insensible
comme une kalachnikov
et provoquant comme un paradis fiscal
un poème de désinformation
et d'abêtissement
de napalm et d'irradiation
contre tous les hypers religieux.
Un poème d'onguents et de baumes et de paroles
comme celles
murmurées à l'oreille des enfants
un poème humble
de grande dignité
qui manierait l'humour et le rire
et qui ne serait plus sur le qui-vive
clamant au vent comme une torchère
fou comme une danse de retrouvailles
et sans colère
Un jour je le ferai.
In : La Poésie est dans la rue : 101 poèmes protestataires pour aujourd'hui
/ rassemblés par Francis Combes. - Éditions Le Temps des Cerises, 2008. - 254 p.
Françoise Coulmin
Née, jour pour jour, cinquante ans après la mort de Rimbaud. Parmi ses recueils : Pour durer (Le Dé bleu / Les Écrits des Forges, Québec, 1993) ; Entrer rebelle en ère de deuil (La Bartavelle, 1997) ; Mais de ce qui se perd (L'Arbre à paroles, 1998) ; Tous les hommes sont des poètes : de A à Z à leur usage (Le Temps des Cerises, 2002) ; Le monde saigne devant toi (Le Temps des Cerises / Les Écrits des Forges, Québec, 2006).
A réuni deux anthologies : Et si le rouge n'existait pas (Le Temps des Cerises, 2009, 67 auteurs) ; Nous, la multitude (Le Temps des Cerises, 2010, 107 auteurs).
Également peintre et géographe (La société paysanne en bocage normand : luttes pour la terre, publié en 1979 avec son mari Pierre aux éditions Ocep).
Déjà présente dans Poesiemaintenant, le 14 octobre 2006.
19:16 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : poème, poèmes, poésie, poésies, littérature engagée, poésie protestataire, révolte, colère
07/02/2010
Pierre Oster
Une timidité hardie devant la gloire de la maison ouverte... D'une gloire aussi présente, nos inscriptions ne témoignent pas. Orgueil des chants que nous tentons.
*
Bien placer les mots les uns contre les autres. Bien les unir. L'art avec l'éthique entre en résonance.
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Je t'envoie une supplique sans objet - elle n'est adressée à personne. Voici que le détail t'en semble exact ; que ma foi t'y est sensible. Quelqu'un déclare que nos secrets se révèleront imbriqués.
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L'équilibre accru que je prône reconnait les constellations intimes, modes de recherche et d'appréhension. Il ne pratique aucun choix, ne repousse rien.
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Un nombre toujours plus pur dans un système voluptueux de systèmes accentuels nouveaux. Rejet - rejet non accidentel - et acceptation des régularités qui fascinent l'enfantine oreille syllabique. Pas de mètres, sinon des mètres sauvages. Réitérées, les dissymétries ne se répètent pas.
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Continuation du sacré par d'autres moyens. Rien que nous ne devions étreindre.
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L'art organisateur et réfléchi nous rend le droit de privilégier le souci fraternel, la conquête morale. Nous ne pouvons plus ne pas éprouver les valeurs.
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Une esquisse m'affronte à l'humanité; une métaphore naissante, dans la pluie brownienne des particules de la langue, s'allume près de ma lampe.
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Autant que les combats, les phénomènes de rapprochement et d'amour méritent d'être scrutés. Sublime du tenon, de la mortaise.
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Rejoue une à une les chances de chaque vers ; traduis les ruines du langage.
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Prosodie du murmure. Prosodie des idées. Alternance de secrètes prosodies dans un discours compatible avec la durée. Use d'une rapidité décisive, d'une décisive lenteur !
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Brides, débris, j'ai besoin de vous. le caillou me sert de pierre angulaire. Avec un fêtu, je fonde en réalité l'acte insurpassable de l'âme. Intéressé à construire, la fuite me corromprait.
Requêtes
Suivi de : Pour un art poétique : ébauches.
- Le Temps qu'il fait, 1992. - 80 p.
Pierre Oster
Né en 1933. A également signé Pierre Oster Soussouev. Parmi ses autres recueils : Le champ de mai (Gallimard, 1955) ; Solitude de la lumière (Gallimard, 1957) ; Un nom toujours nouveau (Gallimard, 1960) ; La grande année (Gallimard, 1964) ; Les dieux (Gallimard, 1970) ; Pratique de l'éloge (La Baconnière, 1977) ; Cérémonial de la réalité (Triangle, 1981) ; L'hiver s'amenuise (Ulysse fin de siècle, 1990) ; L'ordre du mouvement (Babel, 1991) ; Alchimie de la lenteur (Babel, 1997) ; Paysage du Tout : 1951-2000 (Gallimard, Collection Poésie, 2000).
Sur Pierre Oster, lire notamment : La mesure et le flux / Bernadette Engel-Roux (Babel, 1994) et Pierre Oster, poétique et poésie : actes du colloque du Centre de recherches sur la poésie contemporaine, mai 1992 (Publications de l'Université de Pau, 1994).
05:55 Publié dans Poésie | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : poème, poèmes, poésie, poésies