26/04/2009
Alexandre Voisard
Égaré sur le sentier des bêtes
tu parles seul
tu dis : j'aime et j'aimais
et ton falot reste allumé
aux branches jusqu'au matin
mais personne ne te demande plus
de te limer les dents à l'os des framboises
quoi te pousse à vouloir survivre
pour éclairer à tout prix
ces traces de lutte dans le limon
tu ne sais trop tu humes l'air
en attendant que ton ombre te rejoigne
sur ta juste inclinaison.
* * *
Le marchand d'eau
venu sur la pointe des pieds
ne fera pas tort à ton puits
si tu retrouves le refrain
de la chanson que te psalmodiait
la pluie derrière la vitre
si près de ton chevet d'enfant.
De cime et d'abîme. - Seghers, 2006.
- 79 p. - (collection Autour du monde).
Alexandre Voisard
Né en Suisse en 1930. Vit aujourd'hui en France, à deux pas de son village natal.
Parmi ses autres recueils : Aux éditions de l'Aire (Lausanne) : Les rescapés (1984). Aux éditions de l'Age d'Homme (Lausanne) : Liberté à l'aube (1990). Aux éditions Empreintes (Lausanne) : Toutes les vies vécues (1989) ; Le dire le faire, suivi de A l'homme qui joue aux dés avec son ombre (1991) ; Une enfance de fond en comble (1993) ; Le repentir du peintre (1995, Prix Max Jacob). Aux éditions Bernard Campiche (Orbe, Suisse) : Le déjeu (1997) ; ; Sauver sa trace (2000) ; Fables des orées et des rues (2003) ; Poésie 1954-2003 (2006, 4 volumes, collection L'Intégrale / CamPoche).
Également prosateur : Louve : récit (B. Galland, 1972) ; L'année des treize lunes : récit (Aire, 1984) ; Un train peut en cacher un autre : nouvelles (L'Age d'Homme, 1985) ; Je ne sais pas si vous savez : nouvelles (Zoé, 1997) ; Au rendez-vous des alluvions : carnets 1983-1998 (1999) ; L'adieu aux abeilles : nouvelles (B. Campiche, 2003) ; Le mot musique ou l'enfance d'un poète (B. Campiche, 2004) ; Récits (2007, 2 volumes, B. Campiche, 2006, collection L'Intégrale / CamPoche).
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14/04/2009
Geneviève Roch
En pleine tête soudain, le coup claque raide. Sec
et cinglant. Une douleur aigüe s'insinue
jusqu'au profond de l'antre où tu te réfugies
dans ton obscurité et vous force à sortir, ton
attirail de pacotille et toi.
Ébahi tu chancelles mais tu ne tombes pas. Et
même tu te défends tant la surprise est grande.
Pied à pied pour commencer. Un nouveau coup
moins franc, plus méchant. Il te tord et t'abaisse.
Tu ploies. Courbé à toucher terre tu ne veux rien
céder, rien entendre et, cramponné à tes sécurités
dans le désert des apparences, tu organises ta défense.
Le coup suivant s'abat et te terrasse. L'ombre de
ta disparition passe sur toi. Révolte. On ne
disparaît pas ainsi sans raison. Tu te mets à
ramper au hasard des pistes, reniflant le sol.
Avec ton mal qui s'active, des jours et des jours
souffrant, désemparé, tu te traînes tel un vieux
crabe en dérive sur les chemins de nulle part.
De haute lutte. - Multiples, 2007.
- 37 p. - (Collection Fondamente ; 28).
Texte reproduit dans l'anthologie L'année poétique 2009 (Seghers, 2009. 360 p.)
Geneviève Roch
Née en 1935. Parmi ses autres recueils : L'absence escaladée (éd La Porte, 2005) ; Jardin alpin (éd. La Porte, 2008) ; Sans larmes (éd. Éclats d'encre, 2009) ; Aux frontières de l'enclos (Multiples, 2010). Nombreux poèmes publiés en revues : Arpa, Cahiers du Sens, Poésie/Première, ...
Également romancière : 55, rue du Quotidien (Le Temps des cerises, 2002) ; Le sac et vous (Le Temps des cerises, 2005) ; nouvelliste : Corde raide (Chèvre-feuille, 2005) ; peintre et essayiste : Regard de peintre ou Les couleurs de la nuit (Le Temps des cerises, 2006).
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07/04/2009
Hubert Haddad
Je suis le plus jeune enfant que la terre ait porté. En vérité je ne sais pas si je suis né encore. Chaque heure qui passe me laisse sans souffle et prêt à hurler comme le nouveau-né jeté dans le grand jour. Ah ! ne vous fiez pas à vos barbes et vos rides. Sous les paupières et près du nombril la peau est fine, fine comme celle du nourrisson. Vous êtes vous-mêmes de tout petits enfants, si petits malgré vos grands chapeaux et vos airs de savants. Il ne suffit pas de dire des mots définitifs sur le sens du monde pour que le monde se réduise à la leçon des jours. Levez un instant vos fronts bas vers le ciel. Ah ! vous n'êtes pas nés encore. Poussières, poussières dans l'oeil vide d'un dieu. Je suis le plus jeune enfant que la terre ait porté. En vérité je ne sais pas parler encore. Mes yeux sont deux pierres tout au fond de mon crâne et mon esprit plissé de foetus contient comme une éponge toutes les eaux noires du rêve.
Oxyde de réduction. - Dumerchez, 2007.
- 102 p. - (collection Double Hache).
Hubert Haddad
Né à Tunis en 1947, il grandit (?) à Paris, où il vit toujours. Auteur d'une cinquantaine d'ouvrages (poésie, romans, théâtre, nouvelles, aphorismes, essais sur l'art, la danse contemporaine et la littérature), peintre et illustrateur. Parmi ses autres recueils : Le charnier déductif (Debresse, 1969) ; Clair venin du temps (Dumerchez, 1992) ; Crânes et jardins (Dumerchez, 1992) ; Les larmes d'Héraclite (Encrages, 1996) ; Le testament de Narcisse (Dumerchez, 1997) ; Une rumeur d'immortalité (Dumerchez, 2000) ; Le regard et l'obstacle (Rencontres, 2001) ; Petits sortilèges des amants (Zulma, 2001).
A signaler également : Julien Gracq, la forme d'une vie (Castor astral, 1986 et Zulma, 2004) ; ainsi que les deux volumes du Nouveau magasin d'écriture (Zulma, 2006 et 2007).
Un autre extrait d'Oxyde de réduction figure dans L'Année poétique 2009 (éditions Seghers).
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